dimanche 27 février 2022

Si tu franchis le Dniepr...

Pourquoi être surpris, sidéré devant ces images, ces familles réfugiées dans le métro, ces ukrainiens qui prennent le chemin de l'exode ? Tout était pourtant prévisible, visible, et je n'y ai pas cru... 
 
Les conséquences d'une action aussi brutale me paraissent incalculables. Nous sommes également menacés. Mais côté russe aussi, quel est l'objectif recherché? A supposer que la faible Ukraine tombe, que son gouvernement soit liquidé, comment la Russie tiendra-t-elle un aussi grand pays, ses villes de centaines de milliers d'habitants, quand personne n'a été capable de maîtriser trois villages afghans ou sahéliens ?
 
Je recherchais, sans doute pour me rassurer, les mots ambigus de la Pythie: "Si Crésus franchit l'Halys, il détruira un grand empire". 

jeudi 17 février 2022

Au bois dormant

Dans le dernier film de Woody Allen ("Coup de Chance"), le héros ne parviens pas à écrire son livre car il veut être Dostoievski ou Proust. L'équivalent en littérature du syndrome de la belle au bois dormant, qui attend stupidement que le prince charmant vienne la réveiller avec un baiser: il viendra peut-être, peut-être pas...
Combien j'ai pu m'aveugler pourtant, à croire que je pourrais m'affranchir des écrits médiocres et des relations tortueuses ! Le mythe du coup de foudre, le mythe du coup de génie... constituaient ma ligne de vie, la base de tous mes mensonges. 

dimanche 13 février 2022

Où qu'il soit, il fera partie du monde

Réflexion de Martin Gayford en conclusion de son livre sur David Hockney en Normandie, mais applicable aussi à Claude Monnet, aux peintres flamands, à Hokusai: "La morale est la suivante : ce n'est pas le lieu qui est intrinsèquement intéressant, mais la personne qui le regarde. Où qu'il soit, il fera partie du monde."
 
Applicable à toute forme de création artistique peut-être, quand elle s'élève au-delà du folklore, et qui explique qu'on puisse s'émouvoir pour des haïkus, pour l'Odyssée, pour les souvenirs d'un parisien de la belle époque, pour des musiques lointaines... L'important est d'avoir jeté un regard intelligent et sensible, d'avoir vraiment regardé et ressenti, d'avoir voulu (et réussi à) le restituer. 

Il y a des mois que j'ecoute

"Il y a des mois que j’écoute
Les nuits et les minuits tomber
Et les camions dérober
La grande vitesse à la route"

J'avais les premiers mots d'Albertine Sarrazin en tête l'autre jour. C'était une découverte ancienne, (je crois) encore au collège, un livre de poche fripé sur l'étagère la plus poussiéreuse de la bibliothèque (celle consacrée à la poésie !). Mais ces mots ne m'ont jamais vraiment quitté.

Je m'accuse souvent d'avoir gaspillé ma jeunesse, de n'être pas assez sorti, de ne pas avoir assez fait de sport, assez vu de monde, etc. J'ai fait peu de choses, c'est vrai. Et de ce peu de choses, il ne me reste que des souvenirs insignifiants (je vais tâcher d'en reconstituer des bribes). Tous les amis de cette époque se sont évanouis en quelques brèves années.