mardi 30 décembre 2014

Retour sur 2014

Songeant à quelques situations récentes... Personne ne peut juger pour nous de nos sentiments. Parents, amis, enfants même, préfèrent l'illusion de notre bonheur plutôt que le bonheur.

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Confirmé par ce Flirt à Hawaï*, gentil film "de nouvel an" dans lequel toutes les situations impossibles finissent par se résoudre - comme s'il était loisible à toutes d'être aimées par un jeune surfeur hawaïen, surtout après quarante ans! Mais mieux vaut regarder cela que le reste de 2014.

dimanche 7 décembre 2014

Troisième mouvement

On peut critiquer cette ville sur bien des points mais, en ce qui concerne la musique classique, Bruxelles est à un niveau d'excellence mondiale réellement étonnant, dont je peine à trouver l'explication... goûts conservateurs de la riche élite belge? soutien permanent de la famille royale? forme d'art qui, se passant de mots, permet de réconcilier les "communautés"?...

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Concert avec Della Rovere. C'était une fois de plus le Concerto pour l'Empereur, dont une amie m'avait offert une cassette qui m'a accompagné durant toutes mes années d'études...

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Dans la chambre-cellule de l'internat, au milieu de la nuit, j'écoutais le deuxième mouvement "en boucle" (en fait, en le "rembobinant" à chaque fois). C'était il y a quinze ans, déjà! "La partition est à peine ouverte que semblent exécutés les principaux mouvements", aurait dit Paul Toussaint... Et c'était l'époque du Pas d'un pauvre homme, où la mort m'apparaissait comme une éventualité agréable, pourvu qu'elle soit sans douleur ni sans conséquence (y a-t-il eu le moindre changement depuis?). 

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Un changement peut-être (?), j'ai prêté plus d'attention au troisième mouvement, que j'avais jusqu'alors souvent passé sans l'écouter: les marteaux du piano, les reprises des vents, le murmure incertain des contrebasses, et les pages qui défilaient sous les mains du chef d'orchestre... Pour un moment, j'ai été spectateur d'autre chose que de moi-même.

vendredi 5 décembre 2014

Le Cavalier de Zenda

Relu, après l'avoir recherché pendant des années (il aura fallu attendre l'émergence du kindle pour y avoir accès!), le Prisonnier de Zenda que j'avais découvert à l'âge de 10 ans et dont le souvenir ne s'était jamais dissipé. Il est vrai que ce livre contient tout ce qu'il faut pour frapper une imagination d'enfant: décorum aristocratique, action, héroïsme, une belle princesse, etc.
Et j'ai retrouvé comme avant, longtemps après, cette intrigue sur le double (qui, comme le très supérieur Cavalier suédois, ne peut que finir mal), le conflit entre amour et devoir, et la palpitante prise de la forteresse de Zenda. M'avait néanmoins échappé le rôle de Rupert von Hentzau, personnage au départ subalterne, et qui prend progressivement plus d'importance que tous les autres, plus que le roi et ses braves soutiens, plus que la princesse Flavia trop stupide pour être dans la confidence. C'est comme si le joyeux traître s'était affranchi des plans de l'auteur, et vivait sa propre vie.
Normalement, on fait mourir ce genre de contre-héros dans une mort atroce - pour le punir et édifier le lecteur. Mais rien de tout cela n'arrive: dans les dernières pages du livre, Rupert parvient à s'échapper sans difficulté, et Rodolphe se refuse à le tuer, fasciné (il y aurait fort à dire sur cette fascination, ou sur des phrases comme "puis il sauta en selle, de côté comme une femme, et m’attendit"!):
"Et, la joue ruisselante de sang, mais la lèvre souriante, Rupert me salua : il salua aussi la paysanne qui s’était approchée en tremblant de tous ses membres et il partit au galop en faisant de la main un geste d’adieu à Fritz, qui répondit par un coup de feu.
La balle fut bien près de faire son œuvre ; elle alla frapper l’épée qu’il tenait à la main, et qu’il lâcha en poussant un juron.   Je le suivis longtemps des yeux, le long de l’avenue verte ; il s’en allait tranquille, en chantant. Bientôt les profondeurs de la forêt l’enveloppèrent et nous le perdîmes de vue. Il avait disparu, indifférent et circonspect, gracieux et pervers, beau, couard, vil et indompté."

C'est sur ce flot spectaculaire d'épithètes, sur cette statue équestre bondissante, que restera le lecteur, l'obligeant à remettre en perspective toute l'histoire. Après tout, Rupert de Henzau n'est-il pas le seul à proposer à Rassendyll une solution raisonnable vers le bonheur (tuer tout le monde, retrouver la princesse et rester roi)? Tous les autres le condamnent à une vie malheureuse. 
Et peut-être, outre le côté vieillot du livre, est-ce son absence de morale qui fait qu'on ne l'édite plus? Je n'avais pas compris ce message, à l'époque: il y a plus de fortune à se conduire en "scélérat" qu'à suivre le chemin que commande l'honneur!