Frino pourrait dire qu'au fond il n'y a pas de culpabilité à ressentir, ni de doute, si tout est effectué dans la "poursuite du bonheur", dans "l'ouverture de ses chakras"... Et, après tout, le monde contemporain ne semble pas voir d'immoralité dans toutes sortes d'actes autrefois réprouvés (adultère, homosexualité, inceste même, peut-être), pourvu que tout cela soit fait dans la joie et la plénitude. C'est en quelque sorte la conséquence de ce que j'appelais le "devoir du bonheur".
Il n'y a pas de place pour une "mauvaise vie"; seul s'en rend coupable celui qui s'en accuse lui-même. On ne lui pardonnera pas non plus le doute, le revirement, ni la repentance!
Les critères de jugement sont à géométrie variable, car ce n'est plus la société qui les impose aux individus, mais l'individu qui se les fixe. Problème majeur toutefois: le conflit n'a donc plus lieu entre l'individu et la société, mais entre l'individu et les pléiades de systèmes de valeur de ses congénères; il se dessine certes, ici ou là, des modes de pensée dominants (parce que l'homme est trop paresseux ou fatigué pour concevoir ses propres valeurs), groupes, clans... Mais non un vaste ensemble. Et c'est bien là que réside la difficulté, car il n'y a plus de rébellion possible. Il n'y a plus d'ennemi à abattre, nul ne peut adopter d'honnêtes postures d'homme libre, de libertin: l'ennemi est trop nombreux. L'ennemi est partout. Ou, plutôt, il est un peu partout. (insaisissable, ni l'église catholique - insignifiante; ni les pouvoirs publics - accaparés par d'autres soucis plus pressants; ni les bien-pensances - y compris progressistes tant dénigrées).