Gainsbourg a mené le concept plus loin, dans "L'anamour" par exemple, où la rime atteint un niveau si raffiné qu'on ne sait plus quel mot rime avec lequel ("transit" avec "exit"? ou avec "transat"? "pâli" plus avec "pas là" qu'avec "Asie"):
"Aucun Boeing sur mon transit
Aucun bateau sur mon transat
Je cherche en vain la porte exacte
Je cherche en vain le mot exit"
"Tu sais ces photos de l'Asie
Que j'ai prises à 200 Asa
Maintenant que tu n'es pas là
Leurs couleurs vives ont pâli"
Par ce procédé, Gainsbourg a réussi à se débarasser de plusieurs siècle de règles codifiées, à remplcaer la rime par l'assonance (qui est la seule qui compte), une révolution que (je crois) la langue anglaise avait effectuée depuis longtemps*. Malheureusement, cette révolution est venue trop tard, à un moment où la poésie française commençait à s'éteindre. Le champ des possibles est resté inexploré, ouvert néanmoins pour les générations futures qui voudront s'y aventurer.
(*: cf. Yeats, précédemment cité:
"And therefore I have sailed the sea, and come
To the holy city of Byzantium")