dimanche 25 septembre 2011

D'infertiles pâtures

Soirée parisienne dans un milieu fonctionnaro-intellectuel. Après quelques considérations politiques (primaires socialistes, retour de DSK, affaire Karachi) et artistiques (dernières lectures, expositions récentes, foule à ces expositions malgré une "carte culture" que tout le monde semble posséder), la conversation s'est vite orientée vers le vif du sujet, des questions d'argent qui seules semblaient intéresser, finalement. Avec quelque gêne furent comparés les salaires, les statuts et grades, les perspectives.
Par exemple, cette révélation étonnante qu'un scénariste recevrait 3000€ pour un quart d'heure de fiction, alors qu'un pigiste ne toucherait que 75€ pour une journée passée en reportage, non défrayée (chiffres invérifiables mais apparemment de première main). Quelle surprise! Que l'imagination d'un homme vaille quarante fois la vérité!
Et qu'en interpréter sur notre société? Refuserions-nous d'observer, de décortiquer le monde réel, pour nous abandonner à des rêves, des faussetés agréables et chatoyantes? Ou considérons-nous que la vérité n'est finalement pas si intéressante, que sa quête n'en vaut pas la peine: qu'importe en effet, puisque des historiens du futur trouveront bien suffisamment de sources pour nous dire ce qu'il en était vraiment?
Nous éloignons-nous des "Lumières"? Et faudra-t-il jeter à la poubelle (après un modeste effort de tri sélectif) le concept de "société de l'information", comme nous avons envoyé paître dans d'infertiles pâtures les autres vaches sacrées de notre jeunesse, la "fin de l'histoire", "l'alter-mondialisation", ou la "nouvelle économie"?