lundi 31 janvier 2011

Une coquille vide, une place libre (2)

Réflexion faite, ce rêve du renard illustre bien mon rapport aux hommes et à la vie, tel que Paul Toussaint  l'a déjà décrit: "espoir de ce qui ne fut pas", la croyance en la capacité de remonter le temps et d'esquiver l'inéluctable, "souvenir de ce qui sera", l'expérience que tout cela est voué à l'échec.
De cela découle l'envie, la jalousie, le regret de l'imperfection (mon rapport aux hommes), et l'évitement, le doute, le renoncement à la perfection (mon rapport à la vie).
Certainement un peu (trop?) cruel et simpliste, mais cela a le mérite de poser la problème.
On y reviendra... mais on y est déjà venu! puisque ces titres figuraient dans le Voyage d'hiver. Tout était déjà bien compris, à l'époque. Ce que je ne m'explique pas est ce sentiment de découverte, une Amérique déjà explorée, et pourtant nouvelle.

Une coquille vide, une place libre (1)

J'ai brièvement rêvé d'un de mes camarades d'école primaire, imaginant qu'il faisait partie de "ces gens qui ne changent jamais", toujours cette tête de renard aux dents blanches, ces cheveux en brosse. Ce n'était à vrai dire même pas un ami: il ne faisait pas partie de notre "bande". Je ne comprends pas comment j'ai pu repenser à lui après autant d'années.
Je suis allé voir sur Google si le visage avait changé. Manifestement il vit désormais au Canada, où il observe la végétation, fait des recherches dans la nature... Toujours le même air sain et souriant, le visage de renard sympathique dont j'avais gardé l'image. Par quels chemins détournés a-t-il fini par s'occuper des arbres québécois? A l'époque, je ne l'imaginais que jouer au ballon perpétuellement. L'éternité de l'enfance, l'inconscience de la fuite du temps, qui m'avaient rendu cette période si ennuyeuse, si longue. Puis tout s'est déréglé.
Et j'ai toujours le sentiment de cette action vaine, malgré le temps qui passe, de cet enfermement dans les secrets et les univers personnels, indifférents aux déprédations extérieures. Mais lui connaît tous les arbres de la forêt, arpente les montagnes, les bords des rivières, à la recherche d'indices pour améliorer le sort des hommes. Le moindre lichen et la moindre épine lui racontent leur histoire, leur avenir; un monde empli de messages intelligibles, vrais, tandis que je regarde le monde et la nature comme une coquille vide, une place libre, à peine suffisante pour abriter mes rêves.
Il n'y avait nul besoin d'être savant, même en ces temps anciens, pour deviner lequel de nous deux allait avoir droit au bonheur!

dimanche 30 janvier 2011

Rêve de la résurrection...

Ai rêvé de la chose suivante: quelqu'un me disait que le signe de croix "taoïste" (!) était différent du signe catholique en cela qu'au lieu d'indiquer le haut, puis le bas, la gauche et la droite, il commençait d'abord par le bas - de même que l'ordre est inversé entre droite et gauche dans le signe orthodoxe. Selon cette personne (qui?) la raison était que le geste imitait la façon dont Jésus avait porté sa croix, qu'il soutenait forcément par le bas (comme on porte un paquet, ou comme les champions de Highland games portent leur tronc). Je me rangeais à l'avis de cette personne, même si, à la réflexion, l'image habituelle est celle de Jésus portant la croix sur son dos, non devant lui. Je me disais aussi, dans le rêve, que le signe de croix n'était pas lié au premier jour, mais au troisième jour... encore une absurdité, puisqu'il n'est plus question de croix lors de la résurrection!
Tout ce rêve est sans doute lié à ces idées qui me sont venues lors d'une soirée entre amis passablement ennuyeuse, où je me suis posé toutes sortes de question sur la résurrection, ce que j'en pensais réellement, ce que les chrétiens en pensent (vérité? symbole?). J'avais l'intention de relire certains passages de la Bible pour comprendre ce que les évangélistes ont vraiment voulu dire. Y ont-ils assisté (dans mon souvenir, non), y a-t-il des éléments de doute dans leur texte, par exemple sur la nature du Christ après la résurrection?
Faisons ainsi, et promettons-nous d'y revenir un peu plus tard dans ce blog.

samedi 29 janvier 2011

Tunisie (suite de realpolitik)

Le fait que des manifestants aient réussi à renverser le gouvernement de transition, où traînaient encore quelques anciens ministres de Ben Ali, fait remonter dans mon estime la "révolution du jasmin" (quelle mode grotesque de trouver des noms pour les révolutions, c'est idiot). S'il ne s'était agi que d'une révolution de palais (comme je le pensais), tout serait déjà rentré dans l'ordre.
Il faut voir comment les élections à venir aboutiront, comment réagiront les pays voisins que la situation égyptienne risque également d'inquiéter. Le meilleur comme le pire peuvent advenir, mais au moins cela aura le mérite de clarifier une fois pour toute les vieux débats sur la compatibilité de l'islam avec la démocratie, sur la capacité des pays arabes à embrasser le monde moderne - à leur façon mais réellement (et non pas une modernité de pacotille).

Souvenons-nous de cette excellente phrase déjà citée dans les Brèves 1, qui était en rapport avec cette déplorable "affaire des caricatures de Mahomet":
"Les musulmans ont besoin de victoires, et de victoires publiques. Les exemples indien et chinois devraient les faire réfléchir : la vraie force n'est pas dans la démonstration, le hululement collectif ou le sacrifice spectaculaire de soi ; elle est dans le développement du savoir, du libre raisonnement et de l'énergie créatrice. Il faut concurrencer l'Occident pour le tenir en respect, non pas danser autour de lui, en tchador et barbiche, la danse du scalp."

samedi 22 janvier 2011

Realpolitik (2)

Que l'on compare, s'il en était besoin, la piteuse diplomatie française, à l'excellente diplomatie américaine qui vient pour l'instant de réussir un coup parfait en accompagnant le soulèvement tunisien! Car il me semble certain que, sans le soutien discret des États-Unis aux chefs de l'état-major tunisien, les événements auraient pris une autre tournure: il a ensuite suffi d'une expression de désaveu éclatante, le discours de Hillary Clinton le 14 janvier à Doha, pour que la partie fût pliée. Le fruit était mûr... même si j'ai été surpris comme tout le monde, ému, par la fuite soudaine et spectaculaire de Ben Ali.
Della Rovere a légèrement douché mon enthousiasme pro-américain dans cette affaire (mais enfin! il faut lire ce discours univoque!), au motif que les Français ont considérablement plus d'intérêts économiques en Tunisie, qui fait partie de leur "zone d'influence" (avec quel succès...). On peut aussi dire que les Américains ont commencé à comprendre que les régimes corrompus que l'Occident soutenait jusqu'à maintenant faisaient plus le jeu des islamistes qu'ils ne leur nuisaient. Nous étions encore de la vieille école, avec un train de retard: mais, de la part des États-unis, c'est un pari audacieux! Et, avant tout, c'est une expérience: faire vivre pour un moment le laboratoire tunisien, et si le test est concluant, l'étendre à plus grande échelle, lentement, quand l'Égypte, l'Algérie, ou d'autres se rebelleront...
Bien sûr que les Américains poursuivent leur propre agenda, où le destin des Tunisiens est joué d'un coup de dés (mais au moins ils ont un agenda international autre que la défense d'intérêts économiques à courte vue et l'ordre dans les banlieues!), cependant, cette fois, l'action américaine se fait au nom de la démocratie: c'est toujours mieux que de jouer un dictateur contre l'autre comme en Côte d'Ivoire, à Madagascar, ou de soutenir des régimes "kleptocratiques" style Ben Ali qui profitent comme d'habitude à quelques élites parisiennes, comme leur a profité la colonisation et la Françafrique; politique déshonorante et, dans son ensemble, coûteuse.
Encore une fois, je n'aurais pas d'état d'âme qu'une puissance très moyenne comme la France mène une telle politique, si au moins elle était assumée, expliquée et débattue - et au moins si elle l'était par nos "intellectuels", peu enclins à balayer devant chez eux. Un jour on jugera les Français coupables de tout cela, comme on les juge déjà individuellement responsables de la colonisation, et les vrais responsables seront déjà passés à autre chose.

dimanche 16 janvier 2011

Quai de Venise

Rêve que nous étions à Venise avec mes parents et que nous marchions sur les quais qui font face à Murano; nous visitions un musée anecdotique ("musée de la préfecture"). Il y avait beaucoup de touristes, alors que ces quais sont généralement vides - Fondamente grises et battues par les eaux, impression de bout du monde, de "Finistère", accentuée par la proximité de l'île des morts.

mardi 11 janvier 2011

Realpolitik (1)

Pauvre "patrie des droits de l'homme"! Quelle imposture! Nous ne croyons absolument pas à l'universalité de nos valeurs. "Une bonne dictature vaut mieux qu'une mauvaise démocratie." Nous ne considérons pas que la démocratie est source de paix, ni que la liberté est source de prospérité, même pas comme une hypothèse vaguement envisageable!...
Tout cela, finalement, ne me choque guère. Il faudrait même mieux l'assumer sans scrupules ni circonlocution. Notre diplomatie n'abuse de toute façon plus personne.

lundi 10 janvier 2011

Des chevaux qui tombent des arbres...

Des chevaux qui tombent des arbres, un dîner de noël dans une abbaye, la tour de Wim Delvoye transplantée dans une Afrique honorée d'un océan à l'autre, une partie de ping-pong dont la victoire ne fut jamais célébrée... successions du même rêve parti dans des directions incontrôlées, étonnantes...

dimanche 9 janvier 2011

Soleil d'hiver

Et voilà un weekend passé à ne rien faire! Une vague promenade dans un parc, avec un magnifique soleil d'hiver, et la ville en contrebas dans une brume qui turnerisait le paysage, des soirées entre amis... Tout cela était finalement correctement rempli.
Ce sentiment de vacuité, d'inutilité, pourtant. Est-ce lié comme je l'imagine habituellement au fait que je n'ai pas écrit, pas commencé cette Soirée chez Frino? Ou est-ce, au fond, davantage une question sexuelle, sentimentale? La solitude m'inclinant à me remettre en cause?
Surtout, en est-il ainsi pour tout le monde, ou suis-je le seul à vivre dans cette culpabilité permanente, infinie?

lundi 3 janvier 2011

Un véritable Eden (2)

Je regrette un peu la fin emphatique de mon post sur le Liban ("ce pays est une honte pour le genre humain"), pour autant je ne l'ai pas supprimée. Certes, on peut argumenter, avec raison, qu'il y a de nombreux pays bien pire que le Liban où, finalement, les hommes sont relativement libres... et avec le recul, le souvenir de cette discussion avec un ami libanais "enfermé" dans son pays s'efface, pour une impression générale d'un beau pays somme toute agréable.
Pourtant, il serait inconvenant de revenir sur une première impression, généralement plus juste que celle ruminée à distance, une fois la première digestion effectuée... Si j'ai trouvé que ce pays était une "honte", ce n'est pas par indignation lyrique facile: ce que je reproche, c'est en partie que des hommes intelligents, issus de vieilles civilisations prestigieuses, n'arrivent pas à s'entendre sur une terre qui pourrait être un paradis - mais même cela pourrait être admissible, et l'Europe n'a aucune leçon à donner dans ce domaine. Ma principale indignation est adressée à ceux qui voient Beyrouth comme une destination à la mode, avec ses boutiques et ses bars branchés, à ceux qui jouent sur la montagne en niant être sur un volcan. Les libanais sont les premiers responsables de ce discours de la branchitude, mais leur extraversion est pardonnable, elle n'est que la matérialisation de leur angoisse.
Je vois Beyrouth et le Liban comme une destination grave, désespérante. A peu d'amis je recommanderais ce voyage (mais pour ceux-là, ce sera à coup sûr une expérience enrichissante et digne d'être vécue). Quant à moi, j'y retournerai sans doute pour voir comment les choses auront évolué, dans dix ou vingt ans, incha'Allah.

samedi 1 janvier 2011

Salonique

Ai rêvé que je me faisais larguer par la Validée... Tous ces rêves à propos d'amies, de collègues, m'étonnent: je suis sans doute un peu égaré.

"Ou bien es-tu ma propre essence..."

"Ou bien es-tu ma propre essence,
Qui ne cherchait renom ni revenus."

(dans la traduction d'Afsaneh)