En fermant les Origines* d'Amin Maalouf, et en ouvrant un livre basé sur la correspondance de Lawrence Durrell*, je me rends compte qu'écrire sur la génération de nos grands-parents est somme toute chose aisée: l'habitude du courrier a laissé d'eux des informations dispersées mais nombreuses, détaillées. Que laisserons-nous? Que laisseront nos parents? Les longues conversations téléphoniques se sont évanouies: personne ne lira nos courriels trop nombreux et trop utilitaires. Malgré notre bavardage constant, nous demeurerons silencieux pour l'historien du futur...
Si je pense à mon père par exemple, je n'aurai jamais d'autres sources que ces fameuses pages où il ne dit absolument rien sur lui - et quelques uns de mes souvenirs "à charge" (notamment l'épisode du cadeau jeté à la poubelle, qu'il faudra que je raconte un jour). Je n'ai jamais vu mes parents écrire de lettres, sauf à la nouvelle année ou en de rares occasions, mariages ou enterrements, pour exprimer quelques banalités peu informatives. Je ne saurai jamais ce qu'ils ont pensé, ni ce qu'ils ont vraiment vécu (ils ne le savent plus eux-mêmes, peut-être, et peut-être est-ce mieux ainsi?).