Cette caricature de Plantu illustre bien le changement d'opinion qui se fait sur la Syrie. Au lieu de rebelles parés de toutes les vertus, nous percevons maintenant de douteux combattants pas forcément bien intentionnés - et la destinée malheureuse des printemps arabes ne nous incite guère à la complaisance.
C'est comme si soudain nous comprenions le bien fondé de notre realpolitik antérieure, notre soutien à des régimes qui nous faisaient honte (à juste titre), mais qui se présentaient comme les ultimes remparts face à l'islamisme, et que nous tolérions/soutenions comme tels. Loin de combattre l'islamisme, ils l'ont pourtant gardé sous cloche, de façon à pouvoir justifier leur existence - et quel dommage que nous n'ayons jamais pu trouver un régime laïc qui ne fût pas corrompu ou militariste, une authentique démocratie dans un état de droit, qui aurait pu servir de modèle aux autres (certes, il y a le "modèle turc", mais son évolution très récente est assez douteuse).
D'ailleurs, on peut déjà voir un peu plus loin, les "islamistes modérés" de Tunisie ou d’Égypte vont jouer exactement au même jeu, en laissant la bride à des mouvements plus radicaux, à des idiots utiles, pour se présenter comme un moindre mal aux yeux de l'Occident et de leurs propres populations aveuglées. Il suffit de voir les molles réactions des autorités tunisiennes face aux bastonnades et autres joyeusetés menées continûment par des groupuscules salafistes (qu'il ne semblerait pas difficile de faire taire), pour se faire une idée assez fidèle de leur politique à venir et de la façon mesquine et peu inventive qu'ils auront de se maintenir au pouvoir. Dommage, car nous y avons cru nous aussi.
Quant à la Syrie, il est probable que le régime ne tombera pas malgré ses atrocités, et nous n'interviendrons jamais sauf énormité (par exemple, l'usage d'armes chimiques, ou des interventions étrangères lourdes). Le temps a joué pour le régime, la fin amère des illusions printanières*...