jeudi 28 mars 2013

Il grandira car il est espagnol

La découverte inopinée de l'ouverture de la Périchole, conjuguée au bon avancement de certains projets et à l'ambiance studieuse instaurée par Della Rovere (l'un étant la conséquence de l'autre), a joyeusement illuminé cette matinée. C'est l'air qui accompagne les manœuvres vaines de la prostituée dans Ludwig, et que j'avais cherché pendant des années infructueusement (malgré l'existence des inutiles Soundhound et Shazam). Comme il me tarde d'apprendre à le jouer!

Surtout, cela me rappelle une remarque faite rapidement par mon père sur son enfance (une époque sur laquelle il s'épanchait rarement, préférant nous narrer des souvenirs très imaginaires de ses vingt ans, pseudo-voyages autour du monde, proximité avec de grands écrivains*), où il racontait que son père l’emmenait souvent voir des opérettes à Paris, et que c'est une des raisons pour lesquelles il connaissait par cœur tous ces airs qui nous semblaient un peu ridicules ("il grandira car il est espagnol"*, "je suis brésilien du Brésil"*, etc.). J'ignore quel blocage l'a empêché d'être plus aimable envers moi, de m'emmener par exemple au cinéma, ou n'importe où, à défaut de théâtre parisien comme son père le faisait. Mon seul souvenir de cet ordre est d'avoir failli être privé d'aller avec lui voir L'avare joué par des élèves du collège voisin parce que j'avais prononcé un gros mot (le mot "connard", mais pas à son adresse)... J'ignore si je lui en veux; je crois, au fond, que toute son attitude a été de limiter la nuisance, pourtant inévitable et sans doute pesante, que nous aurions pu constituer - en se défaussant sur des préceptes "d'éducation" abstraits et absurdes. La paternité n'a pas revêtu de grande importance pour lui, n'a été ni un objectif, ni encore moins un accomplissement, mais jamais qu'un accident dans une vie ennuyeuse et décousue.
¡Stupide évocation - car désormais mon plaisir d'écouter ces airs d'Offenbach est gâché, tout comme cette journée qui avait débuté si merveilleusement, tout comme le reste peut-être!