samedi 9 mars 2013

Moesta et errabunda

Minuit, hier. Au moment de passer la clé dans la serrure, j'ai été soudain pris par le tentation de ne pas rentrer chez moi, de marcher sans but, dans une de ces longues pérégrinations qui ont marqué mon été. Et je me suis souvenu que depuis toujours j'ai détesté le mois de mars, quand avec l'air doux renaît le regret d'une vie plus vagabonde, loin du confort de l'hiver.
J'aurais arpenté les rues défoncées de la ville, ses quartiers déserts - le long d'autoroutes urbaines, fleuve absent aux reflets lumineux. Puis je me serais arrêté dans un de ses bars à l'éclairage trop vif, où j'aurais fait tournoyer mes questions dans le tourbillon d'une première bière, puis d'une autre, ailleurs.
Par exemple (pensant aux désirs de Della Rovere), j'aurais pu me demander si, en plus du désir physique (quelles illusions pourrais-je de toute façon former à ce sujet?), n'allait pas s'effacer aussi le désir pourtant plus puissant d'une relation sereine, d'un havre où se reposer de sa solitude. Qu'attend-elle de moi?
Gravissant l'escalier, je me suis dit que, finalement, ce blog que je n'avais pas pris très au sérieux, les divers projets, la poésie de Paul Toussaint, avaient bien rempli leur mission pour moi, à défaut d'être utiles à quelqu'un d'autre. S'ils m'ont certes englouti dans l'épaisseur d'une seconde vie, dans la culpabilité perpétuelle de n'en pas faire assez, ils m'ont aussi aidé à passer les portes, à passer les saisons - ne devrais-je pas m'en réjouir? 
Lentement, les envies de vagabondages se sont éteintes, remplacées par quelques mots discrets.