vendredi 10 août 2012

En lisant l'Histoire de ma vie

En lisant l'Histoire de ma vie, de Casanova, je me demandais si tout cela était inventé, tant cette succession de conquêtes semble fabuleuse... Pourtant, il a bien dû se rendre dans les endroits qu'il décrit, et j'imagine que sa vie non-intime est suffisamment bien documentée pour être exacte, de ses débuts dans l'Empire vénitien à ses pérégrinations en Italie et en Europe, sans parler des fréquentes descriptions de ses maladies vénériennes - au moins peuvent-elle servir de preuves!
Mais comment faisait-il? Il avance un commencement d'explication au détour d'une anecdote où, alors qu'il entreprend trois sœurs genevoises, il chante Gaudeant bene nati ("Qu'ils se réjouissent ceux qui naissent bien pourvus"). Sa culture et sa ruse devaient faire le reste.
Surtout, je me demande s'il existe encore à notre époque des individus semblables, d'authentiques aventuriers qui, au-delà de leurs catalogues de conquêtes (car je suis sûr que d'autres font mieux aujourd'hui), vivent volontairement au jour le jour de petits et grands expédients, dans un univers chatoyant et cultivé... Au lieu de cela, nous nous soucions sans cesse de l'avenir, de la fin de nos contrats, nous comptons mesquinement nos points de retraite, espionnés par l’administration et les réseaux sociaux, rognant sur le présent pour ne pas obérer l'avenir. La certitude de la longévité nous a rendu peureux. 
Certes, Casanova est exactement le contre-exemple, lui qui aurait mieux fait de se préoccuper de ses vieux jours - mais peu lui importait à l'époque; jamais sans doute n'a-t-il pensé qu'il allait vivre aussi loin dans le siècle. La vie était brève - plus dense aussi, peut-être.