vendredi 31 août 2012

Vanitas

La Chartreuse de Champmol que, sans doute par assonance, j'avais imaginée au milieu d'une douce campagne sillonnée de paisibles ruisseaux, surmontée de vignes sages. Là devaient reposer, guettées par les statues de Claus Slutter dont j'avais admiré les photographies, les dépouilles des Grands Ducs d'Occident et de leurs épouses, drapées dans une éternité légendaire.
Difficile d'accès, bordée de voies ferrées, d'autoroutes, dans un sinistre hôpital au milieu d'un quartier déshérité, j'ai fini par trouver les quelques restes de la grandiose chartreuse détruite - et même le puits de Moïse ne m'a plus paru qu'une grotesque construction de carnaval.
Alors, bien sûr, Jérusalem et Rome nous ont maintes fois rappelé que nous "sommes poussière et retournerons à la poussière", ou que "sic transit gloria mundi" - mais s'il n'y avait que cela! Car il faudra encore supporter bien d'autres tourments. Il faudra que les derniers lieux sur lesquels nous avons posé nos regards émerveillés, où nous avons envisagé la possibilité d'une félicité éternelle, soient recouverts de voies rapides, de supermarchés, de "marsoports" peut-être, d'où s'enfuiront hâtivement, sans aucune nostalgie, de nouvelles civilisations indifférentes.