Je suis surpris de la surprise provoquée en France par le score du comique Beppe Grillo lors des récentes élections italiennes. Après tout, un homme qui promet de faire le ménage dans une classe politique passablement discréditée ne pouvait qu'attirer des électeurs, surtout avec quelques arguments racoleurs piqués à droite et à gauche.
Je me demande par exemple s'il n'y a pas une comparaison à faire entre le vote Grillo et une partie du vote Bayrou en France: même rejet des partis traditionnels, positionnement sur le "bon sens", absence de propositions bien identifiables et de crédibilité gouvernementale, poids du chef isolé dans sa contestation stérile, sans aucune consultation d'un parti inexistant, etc.... De quoi plaire aux râleurs du dimanche, aux déclinistes, qui se croient représentés dans cette indignation assez large, mais qui - non! - ne se mouilleraient jamais jusqu'à s'engager dans un projet d'avenir. Certes, la rhétorique est moins consensuelle que chez Bayrou (par exemple, le rejet des médias, des étrangers, de l'euro), mais le succès plus certain.
Plus fondamentalement, je me demande s'il ne faut pas aussi y voir la manifestation de ce sentiment collectif que j'ai essayé de décrire il y a quelques mois*, cette envie "d'en finir" avec un ordre ancien qui aurait échoué, de ne plus chercher de solutions à l'intérieur de cet ordre, de provoquer une énorme apocalypse libératrice (au lieu de l'attendre stupidement), un "big bang" d'où naîtrait un monde meilleur.