vendredi 15 novembre 2013

Le dernier optimiste

Un partisan de l'AKP échoué sur ces Brèves, ou n'importe quel lecteur neutre, pourra me reprocher avec justesse de m'être trop intéressé à la situation en Turquie et d'avoir négligé mon propre pays: "graves défis économiques", "triste défaite"... ne pourrait-on en dire autant, voir plus, de la France? Le sentiment d'impasse n'a jamais été aussi puissant, l'impopularité de "l'exécutif" jamais aussi grande, après un état de grâce étonnant mais très éphémère...
Que reproche-t-on au président Hollande? Je ne comprends pas que ses électeurs se soient si vite détournés
de lui. Je pense que c'est un homme honnête, rigoureux, de grande valeur - mais est-ce que cela suffit pour en faire un grand homme d’État? L'absence d'orientation est patente, avec des changements brutaux, des revirements nocifs pour son image: c'est simplement un problème de "leadership" sans doute, mais le mal est fait, et les conséquences n'en seront pas très bonnes pour la société française quoique peu durables. Dans dix ans, on ne se souviendra déjà plus de lui.

Au moins, en bien ou en mal, on ne peut nier à Recep Tayyip Erdoğan qu'il imprime une marque (même néfaste) à son pays, et qu'il ne dévie guère de la direction choisie, quitte à se mettre à dos le tiers des électeurs ou les pays européens. Il a réussi à se débarrasser de la contestation, et l'automne n'a pas été "chaud" contrairement à ce que m'avait assuré mes amis stambouliotes cet été... Quant à l'économie, ce n'est même pas un sujet d'intérêt, tant elle semble bien se porter et tant les sujets politiques sont omniprésents (laïcité, problème kurde, guerre en Syrie, nouvelle constitution) - alors que nous sommes obsédés par notre déclin. Sans doute nous voyons nous plus faibles que nous ne le sommes, et la Turquie plus solide qu'elle ne l'est (par exemple, je viens de redécouvrir que le taux de chômage y est de 9,8%).
Peut-être que je ne prends pas nos problèmes assez au sérieux, que je sous-estime la gravité de la crise économique ou politique que traverse le pays, que je n'écoute pas assez les prophètes de malheur... Je dois être le dernier optimiste de ce continent.